Arrêt no 41/91 du 4 Juillet 1991

Arrêt no 41/91 du 4 Juillet 1991
Source : SIJIP - Système d'informations juridiques, institutionnelles et politiques (A.I.F.)


Société S. G. et C. - M. T. P. et H. c. H. E.
3 - RESPONSABLILITE CIVILE. REPARATION DE PREJUDICE SUBI - APPLICATION DE L'ARTICLE 1382 C. CIV. REJET DE L'EXCEPTION D'INCOMPETENCE DU JUGE CIVIL
DANS CET ARRÊT, LA COUR D'APPEL DE COTONOU A CONFIRMÉ LA COMPÉTENCE DU JUGE CIVIL MOTIF PRIS DE CE QU'IL NE S'AGIT PAS EN L'ESPÈCE DE DOMMAGES RÉSULTANT DES TRAVAUX PUBLICS POUR LESQUELS LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE SERAIT COMPÉTENTE MAIS D'UNE ACTION EN RÉPARATION CIVILE.

Président : Clotilde MEDEGAN
Conseillers : KOUKOUI Honoré D ; FALADE Valentin
Greffier : Reine TSAWLASSOU
Avocats : Alfred POGNON ; Luiz ANGELO

La Cour

Attendu que les sociétés G. et C. assistées de Me POGNON ont, par exploit du 04 Février 1985, interjeté appel du jugement no 19 en date du 30 Janvier 1985 rendu par le Tribunal de première instance de Cotonou ;

Que l'Agent Judiciaire du Trésor pour le compte de l'Etat et le sieur H. E. ont, respectivment par lettre du 08 Février 1985 et par exploit d'huissier du 13 Février 1985, formé appel incident de la même décision ;

Attendu que ces actes sont faits suivant les forme et délai de la loi, qu'il échet de les déclarer recevables ;

Attendu que les faits de la cause sont amplement rapportés par les motifs de la décision attaquée ; qu'il convient de s'y référer ;

Qu'il suffit de rappeler que les sociétés G. et C., chargées de l'exécution des travaux de canalisation à Akpakpa, ont été de même que le S. E. G. du M. T. P. assignées par le sieur H. E. pour s'entendre condamner à lui payer la somme de 5.838.298 francs et celle de 2.000.000 francs pour les préjudices matériel et moral subis du fait que les tranchées creusées, alors qu'elles ont été fermées avec diligence à certains endroits, sont restées longtemps ouvertes devant sa maison, rendant ainsi difficile l'accès à son domicile ;

Que les défendeurs ont soulevé in limine litis l'incompétence du tribunal civil au motif que le contentieux des travaux publics relève de la compétence de la juridiction administrative et se sont par ailleurs portés demandeurs reconventionnels de la somme de Trois Millions Cinq Cent Mille (3.500.000) francs en réparation du préjudice résultant de l'abus commis par le demandeur du droit d'ester en justice ;

Que par jugement no 19 du 30 Janvier 1985, le Tribunal de Première Instance de Cotonou a rejeté l'exception d'incompétence et la demande reconventionnelle, a mis hors de cause le S. E. G., et condamné les sociétés G. et C. à payer à H. E., toutes causes de préjudices confondues, la somme de Trois Millions Six Cent Cinquante Huit Mille Trois Cent Vingt Cinq (3.658.325) Francs ;

Qu'appel de cette décision a été relevé ;

Attendu que reprenant les moyens par eux soutenus en première instance, G., C. et le S. E. G. concluent par l'organe de Me POGNON à l'incompétence du tribunal civil et demandent qu'il plaise à la Cour infirmer le jugement entrepris, dire et juger que tous dommages nés à l'occasion des travaux publics sont de la seule compétence de la juridiction administrative ;

Attendu que H. E. assisté de Me ANGELO estime que la somme à lui allouée par le premier juge ne saurait couvrir l'étendue du préjudice subi ; qu'il sollicite donc l'infirmation du jugement querellé sur ce point et la condamnation de G. et C. au montant de Cinq Millions Huit Cent Trente Huit Mille Deux Cent Quatre Vingt Dix Huit (5.838.298) francs résultant du rapport d'expertise ;

Attendu que la Cour adopte les motifs du premier jugement quant à la compétence du Tribunal Civil ; qu'en effet dans l'espèce soumise au juge judiciaire, il ne s'agit pas de dommages résultant des travaux publics pour lequel la juridiction administrative serait compétente, mais d'une action ayant pour objet de faire déclarer civilement responsables, par application de l'article 1382 du Code Civil, des personnes morales de droit privé qui, exécutant un marché de travaux publics, ont causé par leur faute des préjudices à un particulier ;

Que c'est donc à bon droit que le juge civil s'est déclaré compétent ;

Attendu qu'à l'appui de son appel incident, H. E. allègue que les dommages à lui causés par le fait des sociétés G. et C. ne sauraient être évalués à moins de 5.838.298 francs comme l'atteste le rapport d'expertise ;

Mais attendu que le juge n'est pas lié par l'avis de l'expert ; qu'il peut, selon son intime conviction, rejeter en totalité ou en partie ses conclusions ou les entériner ;

Qu'en l'espèce, l'examen minutieux et détaillé des éléments du rapport d'expertise fait apparaître que le montant retenu au titre des dommages subis par H. est exagéré ; qu'en exemple, le manque à gagner enrégistré par le commerce du charbon aurait dû être calculé sur la base du bénéfice réalisé par jour sur chaque sac et non sur le prix de vente ;

Qu'en fixant à la somme de 3.658.325 francs le montant du préjudice, le premier juge a fait une saine appréciation des faits de la cause ;

Attendu par ailleurs que H. E. soutient que la résistance abusive des sociétés appelantes qui ont laissé traîné la procédure en ne concluant pas sur les mérites de appel, est une nouvelle cause de préjudice ; que ce dommage mérite d'être réparé ;

Attendu que H. E. ne rapporte pas la preuve du dommage ainsi allégué ni n'en précise le montant ; qu'il échet de rejeter ce moyen ;

Par ces motifs : Et ceux non contraires du premier juge que la Cour adopte ;

Statuant publiquement contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

Reçoit les sociétés G. et C. en leur appel principal, le S. E. G. et H. E. en leur appel incident.

- Confirme le jugement no 19 en date du 30 Janvier 1985 du Tribunal de première Instance de Cotonou en toutes ses dispositions,

- Condamne les sociétés G. et C. aux dépens dont distraction au profit de Me ANGELO, avocat aux offres de droit.

Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement.