Arrêt no 12/88 du 5 Mai 1988

Arrêt no 12/88 du 5 Mai 1988
Source : SIJIP - Système d'informations juridiques, institutionnelles et politiques (A.I.F.)

 


Société A. J. c. Société A. et Fils et Société S. B. D.
1 - VOIES D'EXECUTION - VENTE COMMERCIALE - NON - PAIEMENT DU PRIX - SAISIE CONSERVATOIRE SUR LES MARCHANDISES TROUVEES EN STOCK CHEZ LE SAISI - INTERVENTION VOLONTAIRE EN DISTRACTION DE MARCHANDISES SAISIES - COLLUSION FRAUDEULEUSE - DOMMAGES-INTERETS - SAISIE EXECUTION - CONFIRMATION
LE DÉBITEUR D'UNE CRÉANCE N'EST PAS RECEVABLE À SOUTENIR UNE EXCEPTION TIRÉE D'UNE CONCILIATION VERBALE SANS EN RAPPORTER LA PREUVE DONT L'EXISTENCE LUI AURAIT CONFÉRÉ VALEUR D'UNE TRANSACTION AVEC L'AUTORITÉ DE LA CHOSE JUGÉE LÉGALE.

UN INTERVENANT VOLONTAIRE EN DISTRACTION D'OBJETS SAISIS N'EST RECEVABLE, EN LA FORME, S'IL NE SE CONFORME PAS AUX DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 608 DU C.P.C. ET AU FOND LORSQU'IL NE RAPPORTE PAS LA PREUVE DE SON DROIT DE PROPRIÉTÉ SUR LESDITS OBJETS.


Président : Fernande BANKOLE
Conseiller : ALKOIRET TRAORE
Greffier : Geneviève GBEDO
Avocats : G d'ALMEIDA-ADAMON ; A ZINZINDOHOUE ; A POGNON

LA COUR

Attendu que le jugement no 161 du 1er Juillet 1987 contradictoire entre la S.B.D., A. A. M. R. et l'intervenant volontaire A. J. a été appelé respectivement le 6 Juillet 1987 par la Société A. J. et le 10 Août 1987 par la Société A. et Fils ;

Attendu que ces actes d'appel sont intervenus dans les délai et forme de la loi ; qu'il échet de les déclarer recevables ;

Attendu que le 10 Août 1987 A. J. fit une assignation à bref délai à la Société B. D. et à la Société A. et Fils aux fins de s'entendre ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement en date du 1er Juillet 1987 du Tribunal de Première Instance de Cotonou ;

Attendu qu'il échet d'ordonner la jonction de la décision appelée avec l'incident de sursis à exécution aux fins qu'il soit statué sur les deux par une seule et même décision ;

Attendu que par exploit en date du 4 Mars 1987, la S.B.D. assignait le Sieur A. A. M. R. à comparaître le Mercredi 18 Mars 1987 par devant le Tribunal de Cotonou statuant en matière civile et commerciale, pour, est-il dit dans cet exploit :

"Attendu que la requérante est créancière de Monsieur A. A. R. à l'enseigne Société Y. et Fils, de la somme principale de 81.048.348 F CFA suite à la livraison par la Société B.D. au requis de diverses marchandises dont il s'acquitte difficilement du paiement ; que toutes demandes amiables tentées pour amener le requis à s'acquitter de sa dette sont demeurées vaines ; que la requérante a obtenu une ordonnance de saisie conservatoire pour ladite créance dont le montant provisoire est évalué à la somme de 81.048.348 F CFA.

"Attendu que pour sûreté conservatoire, la requérante fit pratiquer une saisie-conservatoire en date des treize et dix-sept Février 1987 sur les facultés mobilières de son débiteur en vertu de l'ordonnance précitée ; que cette saisie conservatoire est régulière en la forme et juste au fond ; qu'il échet de la valider ;

"Attendu que par conclusions en date du 13 Mars 1987 de Me G. d'ALMEIDA ADAMON, la Société A.J. intervient volontairement aux débats en qualité de propriétaire des marchandises saisies pour en solliciter la distraction ;

"Attendu que la décision querellée a, dans son dispositif, reçu en la forme les parties en leur action et demande reconventionnelles, déclaré au fond, les Sociétés A. J. et A. et Fils mal fondées en toutes leurs demandes, les en a déboutées et a converti la saisie conservatoire en saisie exécution et a condamné les Sociétés A. J. et A. et Fils à payer conjointement et solidairement à la S.B.D. la somme de 31.600.250 F à titre de dommages-intérêts ;

Attendu qu'en cause d'appel, la Société A. et Fils ne conteste pas le principe de la dette, mais soutient qu'un accord verbal existe entre elle et la Société créancière portant, d'une part, sur le montant de la créance ramenée de 81.048.348 F à 46.000.000 F, d'autre part, sur un mode de règlement amiable de 300.000 F par mois ; que cet accord verbal est respecté par A. et Fils qui a déjà versé dans ce cadre 9.600.000 F faisant ainsi la preuve de sa bonne foi ;

Que s'agissant du droit de propriété des marchandises saisies le 13 Février 1987 dans les locaux de la Société A. et Fils, ces marchandises appartiennent effectivement à la Société A. J. comme elle l'a prouvé par des pièces communes et particulières et des connaissements maritimes ;

Que suivant la loi, la doctrine et une jurisprudence constante seuls les biens du débiteur peuvent être saisis ;

Qu'il échet pour une bonne administration de la Justice et même dans l'intérêt commun de distraire ces objets de la saisie et de les restituer à leur légitime propriétaire qui est la Société A. J. ; qu'en effet la Société A. et Fils n'honore ses engagements vis-à-vis de la S.B.D. que grâce aux commissions de 2,5% qu'elle touche sur la vente de ces marchandises reçues en dépôt pour vente dans ses locaux ;

Attendu que l'intervenante volontaire, la Société A. J., soutient qu'elle avait mis en dépôt des marchandises constituées de 1042 balles et rouleaux de tissus chez la Société A. et Fils pour une valeur de 40.000.000 F que la Société A. et Fils devait vendre à charge par elle de rendre compte à la Société A. J. qui devait lui donner une commission de 2,5% sur celles effectivement vendues ;

Que le 13 Février 1987, elle fut avertie de ce que ces marchandises étaient en train d'être saisies chez le Sieur A. débiteur de la S.B.D. ; qu'elle s'est opposée à ladite saisie en exhibant à l'huissier ses titres de propriété ; qu'elle sollicita la main-levée de la saisie devant le Juge des référés qui s'est déclaré incompétent pour contestation sérieuse le 26 Février 1987 ;

Attendu qu'elle soutient, s'agissant du droit de propriété de la Société A. J., qu'elle avoue en toute bonne foi que les marchandises saisies n'appartiennent pas à la Société A. et Fils et articule que si l'on était dans un pays de droit véritable, cette simple affirmation suffirait à elle seule à entraîner la conviction du Juge ;

Que s'agissant de l'application de l'article 2279 du Code Civil, il est aisé de constater que, pour que ledit article soit applicable, il faut en premier lieu qu'il s'agisse des biens corporels individualisés, que s'il est constant que toutes les marchandises qui ont été saisies par la S.B.D. ne sont pas individualisées, elles portent toutes le sceau de la Société A. J. qui n'est en aucun cas débitrice de la S.B.D. ;

Qu'il y a lieu de souligner que les marchandises étaient en dépôt chez A. qui en tout état de cause, n'en était qu'un détenteur précaire et simple ; que le détenteur précaire et simple ne peut être propriétaire, d'après la jurisprudence, que s'il produit une inversion de son titre ;

Attendu par ailleurs qu'elle soutient qu'en second lieu, l'application de l'article 2279 du Code Civil suppose que le détenteur se comporte comme étant le véritable propriétaire ;

Qu'en l'espèce, la Société A. n'a jamais remplacé sur les balles de tissus, le nom du véritable propriétaire ; qu'il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris et de restituer à la Société A. J. toutes les balles de tissus saisies sans fondement juridique véritable ;

Attendu que la concluante développe qu'elle sollicite de la Cour qu'elle constate que l'intimé ne rapporte pas la preuve qu'il s'agit d'une vente et qu'il y a lieu de le débouter sur ce point et de confirmer le droit de propriété de la Société A. J. sur les marchandises objet de la saisie ; qu'en effet, dans la mesure où les deux parties mandant et mandataire confirment qu'il s'agissait d'un mandat, ils sont désormais liés par l'acte qu'ils ont librement signé ; que doit s'appliquer à eux les dispositions de l'article 1134 du Code Civil : "Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites", qu'il est de jurisprudence constante que le Juge ne peut aller à l'encontre d'une volonté librement exprimée des parties ; qu'en conséquence, l'on ne peut parler de vente, alors qu'il a été prévu expressément une rémunération de 2, 5% de la Société A. et Fils sur les marchandises vendues par elle ; qu'il y a lieu de confirmer le droit de propriété de la Société A. J. ;

Attendu que sur l'attribution des dommages-intérêts à la S.B.D. J. A. soutient que le Premier Juge l'a justifié sur la base d'un concert frauduleux entre les parties consistant à la rédaction d'un contrat de dépôt alors qu'il s'agit d'une vente ; que cette prétendue faute n'a pas été juridiquement explicitée ; qu'en l'espèce A. J. n'a jamais éludé une loi impérative de concert avec A., qu'elle a plutôt revendiqué un bien confié à A. ; que la Société A. loin de frustrer la S.B.D. dans ses droits, a donné à A. et Fils les moyens de payer sa dette et sollicite en conséquence d'infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions, de dire et juger que les marchandises objet de la saisie sont et demeurent la propriété de la Société A. J. ;

Attendu qu'elle sollicite par contre, que la S.B.D. soit condamnée à lui payer la somme de 25 millions de francs à titre de dommages-intérêts ; sur la base des articles 1382 et 1142 du Code Civil en réparation du grave préjudice qu'elle a subi du fait de la saisie de ses marchandises, qui a entraîné pour elle, une diminution effective de son patrimoine et le gain qu'elle escomptait avoir si les marchandises avaient pu être vendues en temps opportun ;

Attendu qu'en réplique, la S.B.D. sollicite qu'il lui soit donné acte de ce que la Société A. et Fils s'oblige dans ses conclusions du 7 Avril 1987 à n'en pas davantage conclure sur la certitude de la créance, donc sur le mérite de la demande objet de la présente instance en paiement et en validation ;

Attendu qu'elle développe s'agissant du droit de propriété des biens saisis que les marchandises litigieuses constituent l'essentiel de l'achalandage du fonds de commerce de la Société A. et Fils ; que lesdites marchandises ont été saisies dans la boutique même de la Société A. et Fils ; que leur possession par la Société A. et Fils qui les a offertes en vente au public vaut titre de propriété et cela conformément à l'article 2279 Code Civil qui dispose : "en fait de meubles possession vaut titre".

Attendu qu'elle soutient par ailleurs s'agissant de la convention du 17 Septembre 1986 entre A. et Fils et A. J., que cette convention mérite d'être requalifiée : "la remise d'une chose à charge de la restituer ou d'en payer le prix est une vente à condition et non un dépôt (TOULOUSE 09 Juillet 1891 D.P. 94. II 138 ; Crim. 22 Juin 1960 D.P. 60.I. 471) que ladite convention ne saurait être prise en considération pour les raisons ci-après :

1 - La Société A. et FILS co-signataire de la convention et subissant la saisie n'a point fait cas ni pendant la saisie, ni immédiatement après, de l'existence de cet acte qui n'a été exhibé pour la première fois que devant le Juge des référés et par la Société A.J. ; que cette attitude de la co-signataire A. et Fils ne s'explique que parce qu'au moment des saisies l'acte confectionné pour les besoins de la cause n'existait pas.

2 - La convention du 17 Septembre 1986 répond bien à la définition qu'en donne la jurisprudence :

"Le contrat par lequel un négociant remet à un tiers des marchandises facturées à un prix déterminé et à condition, c'est-à-dire avec faculté pour ce tiers de renvoyer les marchandises qu'il n'aurait pas vendues et obligation de payer le prix de celles qu'il vendra constitue, non un dépôt mais une vente".

DOUAI 28 Février 1905 D.P.1905 II 442

Attendu que la S.B.D. articule que la Société A.J. en tentant frauduleusement et de concert avec la Société A. et Fils de faire échec aux saisies opérées en garantie d'une créance qu'elle sait être certaine, liquide et exigible a occasionné à la concluante un préjudice ; qu'elle réclame pour la réparation de ce préjudice une somme de 50 millions Francs à payer conjointement et solidairement par les fraudeurs ;

Attendu qu'il n'est pas contesté qu'entre la S.B.D. et la Société A. et Fils existe une créance de 81.048.348 francs, laquelle a servi de fondement à une saisie conservatoire sur les effets mobiliers de la Société A. et Fils dans ses magasins ;

Attendu qu'il est également constant que la Société A. et Fils a fait des versements successifs jusqu'à concurrence de 9.600.000 francs réduisant le principal à 71.448.348.

Attendu que la Société A. et Fils soulève l'exception d'une conciliation verbale, réduisant la créance à 46 millions.

Attendu que cette exception ne peut être prise en considération parce que le montant est trop élevé pour qu'il ne soit étayé d'aucune preuve formelle, car si cette preuve existait elle aurait valeur d'une transaction avec l'autorité de la chose jugée que lui confère la loi ;

Qu'il échet en conséquence de donner acte à la Société S.B.D. de ce que la Société A. et Fils s'oblige à n'en pas davantage conclure sur la certitude de cette créance ;

Attendu qu'en distraction d'objets saisis, lorsqu'un tiers veut obtenir la distraction des meubles indûment saisis, trois situations peuvent se présenter suivant que ce tiers fait valoir ses droits avant le procès-verbal de saisie, après la saisie mais avant l'adjudication ou après le procès-verbal d'adjudication ;

Attendu qu'il est incontestable que l'espèce présente se situe dans la seconde hypothèse ; que la Société A.J. après avoir échoué en référé, a fait valoir ses droits après la rédaction du procès-verbal de saisie mais avant le jugement de validation ;

Attendu que la procédure en l'espèce est régie par l'art. 608 Code de Procédure Civile qui dispose : "celui qui se prétendra propriétaire des objets saisis pourra s'opposer à la vente par exploit signifié au gardien, et dénoncé au saisissant et au saisi, contenant assignation libellée et l'énonciation des preuves de propriété ; à peine de nullité..."

Attendu que cela signifie que le tiers doit faire signifier par huissier un exploit d'opposition au gardien constitué dans le procès-verbal de saisie pour lui faire défense de laisser enlever et vendre les meubles avant que l'incident soit réglé, puis il doit dénoncer par exploit d'huissier cette opposition au créancier saisissant et au débiteur saisi et les assigner devant le Tribunal compétent, l'assignation du saisissant et du saisi est une formalité substantielle qui ne peut être faite par de simples conclusions (DOUAI 28 Novembre 1907 D.P. 1913 V 36 Encyclopédie DALLOZ PROC II Saisie Exécutoire No 276)

Attendu que l'assignation est faite aux délais ordinaires des ajournements :

Attendu qu'il est constaté que la Société A. J. intervenante à l'instance en validation, pour réclamer la propriété des marchandises saisies, l'a fait par simples conclusions ; s'agissant de la violation d'une formalité substantielle, elle rend irrecevable, en la forme, l'action en distraction d'objets saisis de la Société A. J. ;

Attendu que la Cour aurait pu s'en tenir à l'irrecevabilité de la forme, mais elle préfère malgré tout passer outre et aller au fond ;

Attendu qu'il est très important de noter que la jurisprudence se montre, à juste titre, très stricte en matière de distraction d'objets saisis afin d'empêcher les manoeuvres dilatoires concertées entre le saisi et le tiers ;

Qu'en matière de distraction d'objets saisis, protection est due au gage du créancier saisissant contre les revendications souvent frauduleuses de prête-noms ;

Attendu que le droit revendiqué par la Société A.J. est confondu avec le droit reconnu à la Société A. et Fils sur le fondement des articles 2228 et 2279 du Code Civil sur les marchandises saisies dans la boutique de la Société A. et Fils ;

Attendu que s'il est constant que les marchandises saisies ont été commandées par la Société A. J. comme le prouvent les connaissements versés au dossier, le problème est de savoir si ces marchandises ont été vendues ou non par elle à la Société A. et Fils ; c'est-à-dire s'il y a eu transfert du droit de propriété à la Société A. et si par voie de conséquence la saisie opérée par la S.B.D. créancière de la Société A. et Fils est valablement faite ;

Attendu que pour faire échec à ladite saisie, les Sociétés A. J. et A. et Fils versent au dossier une convention établie entre elles le 17 Septembre 1986 et selon laquelle les marchandises constituées de lots de tissus, d'une valeur de 40.000.000 F ont été mises en dépôt par la Société A. J., à charge pour la Société A. et Fils de les vendre et d'en verser le prix à la Société A. J. contre paiement d'une commission de 2, 5% sur les marchandises vendues ; au cas où celles-ci ne le seraient pas, la Société A. J. se réserve le droit de les retirer ;

Attendu que la nature des contrats se détermine non par les termes employés ou les qualifications données par les parties, mais par l'objet des conventions que les Juges de fait doivent apprécier. (CASS. 12 MARS 190I.S. 19OI. 1.408) ;

Attendu qu'aux termes de l'article 1915 du Code Civil, le dépôt est l'acte par lequel on reçoit la chose d'autrui avec charge de la garder et de la rendre en nature ;

Qu'en conséquence, la charge de conserver et de rendre en nature la chose déposée est une condition essentielle du dépôt (CASS CRIM.5 MARS 1897 D.P. 98.I 27) ;

Que la remise d'une chose à charge de la restituer ou d'en payer le prix est une vente à condition et non un dépôt (CRIM. 22 JUIN 1860. DP. 60.I.471) ;

Attendu, s'agissant de la convention du 17 Septembre 1986 versée au dossier, qu'il échet de s'en tenir à la définition suivante de la jurisprudence "Le contrat par lequel un négociant remet à un tiers des marchandises facturées à un prix déterminé et à condition, c'est-à-dire avec faculté pour ce tiers de renvoyer les marchandises qu'il n'avait pas vendues et obligation de payer le prix de celles qu'il vendra, constitue non un dépôt, mais une vente (DOUAI 28 FEVRIER 1905 DP. 1905.II.442)

Que partant de cette définition qui cadre avec la convention versée au dossier, il y a inversion de titre de propriété qui passe de la tête de A. J. sur celle de A. et Fils ; que partant de là, les marchandises sont et demeurent la propriété de la Société A. et Fils ;

Attendu que la Cour adopte les motifs du Premier Juge en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts revendiqués par la Société A. J. au motif qu'il n'a subi aucun préjudice, les marchandises saisies étant la propriété de A. et Fils ;

Attendu que la convention intervenue le 17 Septembre 1986 entre les Sociétés A. J. et A. et Fils n'a été présentée pour la première fois devant le Premier Juge que lors de la procédure en validation ;

Que cet acte n'a été exhibé ni au moment de la saisie par ses auteurs, ni devant le Juge des référés lors de la procédure aux fins de main-levée de saisie introduite par la Société A. J. ;

Attendu que cette convention qualifiée à tort de contrat de dépôt n'a été rédigée pour les besoins de la cause que pour masquer une vente ;

Que ce faisant les Sociétés A. J. et A. et Fils ont tenté de faire échec aux saisies opérées en garantie de la créance de la S.B.D. ;

Que ces manoeuvres dilatoires concertées tendent à soustraire frauduleusement à la saisie le gage du créancier saisissant et constituent une résistance abusive de la part desdites Sociétés ;

- Attendu qu'il y a lieu de sanctionner ce concert frauduleux en allouant à la S.B.D. les dommages-intérêts réclamés par elle, sauf à les réduire à des proportions raisonnables que la Cour fixe à la somme de 10.000.000 F ;

Qu'il y a lieu d'infirmer la décision querellée sur ce point ;

Par ces motifs : Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et commerciale et en dernier ressort ;

En la forme :

Reçoit les appels de la Société A. et Fils et de la Société A. J.

- Déclare joint au fond, la procédure de sursis à exécution ;

Au fond :

- Donne acte à la Société A. et Fils de ce qu'elle ne conteste pas le principe de la créance de 71.448.348 F existant entre elle et la S.B.D.

- Infirme la décision querellée en ce qu'elle a déclaré recevable l'action de la Société A. J.

- Déclare irrecevable en la forme l'action en distraction d'objets saisis de la Société A. J. en violation de l'article 608 du Code de Procédure Civile.

- Confirme pour le surplus le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qui a trait aux dommages-intérêts alloués à la S.B.D. que la Cour arbitre, à la somme de 10.000.000 F.

- Dit que le jugement sortira son plein et entier effet en ce qui concerne sa conversion en saisie exécution ;

- Condamne les Sociétés A. et Fils et A. J. aux dépens dont distraction au profit de Me POGNON.

Ainsi fait jugé et prononcé publiquement par la Cour d'Appel de Cotonou.